MÉMOIRE DE LA FÉDÉRATION DU TRAVAIL
DES TERRITOIRES DU NORD

Sommaire

Au nom des 9 000 membres et plus de la Fédération du travail des Territoires du Nord (FTTN), je vous remercie de nous donner l’occasion de présenter nos recommandations pour le budget fédéral de 2012.

La FTTN regroupe de nombreux syndicats et représente ainsi des travailleurs d’une multitude de métiers habitant les Territoires du Nord-Ouest ou le Nunavut.

Étant donné que le mémoire doit se limiter à trois recommandations, la FTTN demande à nouveau au gouvernement fédéral 1) de créer un conseil arbitral de l'assurance-emploi (AE) pour les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut, 2) d’accroître la déduction fiscale pour les habitants du Nord et 3) d’améliorer le Régime de pensions du Canada pour garantir une sécurité de revenu de retraite.

1. Conseils arbitraux de l'assurance-emploi

Compte tenu de leurs salaires plus élevés qu’ailleurs au Canada, les travailleurs et employeurs des T.N.-O. et du Nunavut sont plus susceptibles d’atteindre le seuil de cotisation annuelle maximale à l’AE, mais ils ont beaucoup de difficulté à engager une procédure d’appel en raison de l’emplacement des conseils arbitraux de l’assurance-emploi.

Lorsque ces conseils ont été établis il y a plus de 25 ans, Whitehorse, au Yukon, a été la seule ville du Nord à être dotée d'un conseil arbitral (CA). Depuis, les habitants des T.N.-O., et maintenant du Nunavut, sont donc obligés d’interjeter appel auprès du CA d'Edmonton, en Alberta.

En 2000, des membres du conseil arbitral de l'AE d'Edmonton se sont adressés à la Commission de l'assurance-emploi afin de lui faire part de leurs préoccupations et frustrations à l'égard des audiences téléphoniques entre Edmonton et les T.N.-O. L'un des membres a affirmé : « En tant que non-Autochtone, je ne suis pas à l'aise d'appliquer le critère du caractère raisonnable aux habitants du Nord. Le but de former un conseil arbitral au sein d'une collectivité est d'établir un groupe de pairs qui peuvent appliquer le critère du caractère raisonnable. » Un autre a déclaré : « Nous ne sommes probablement pas les mieux placés pour comprendre les difficultés et les obstacles auxquels les travailleurs du Nord sont confrontés. »

Malgré leurs demandes répétées d'établir un conseil arbitral de l'AE dans les territoires, 11 ans plus tard, rien n'a été fait. Il existe 83 conseils arbitraux partout au pays; il est donc inadmissible que les habitants des T.N.-O. et du Nunavut doivent faire entendre leurs appels en Alberta.

Lorsque la FTTN demande des explications sur la raison de cette lacune, on lui répond que les T.N.-O. ne satisfont pas aux critères concernant le volume d'appels. Malheureusement, ces critères ne sont pas clairement définis et semblent changer selon la personne à qui nous nous adressons.

D'après les statistiques publiées pour les T.N.-O. et le Nunavut jusqu'au 5 février 2009, le nombre d'appels déposés auprès du conseil d’Edmonton et traités dépassait de loin celui du conseil du Yukon.

La FTTN affirme que ce nombre est bien inférieur à ce qu'il serait s’il existait un conseil arbitral dans les Territoires. L'obligation d’interjeter appel par écrit (dans les 30 jours suivant la date de la décision) empêche de nombreux chômeurs d'avoir accès au système. Étant donné le coût de la vie très élevé dans le Nord, bon nombre d'entre eux abandonnent leurs démarches et quittent la région, d’où l’exode de nombreux habitants des T.N.-O., particulièrement durant la récente crise économique.

Il est donc impératif que le budget de 2012 prévoie les fonds nécessaires à la création d’un conseil arbitral de l'AE pour les T.N.-O. et le Nunavut.

Un tel centre devrait coûter environ 65 000 $ au gouvernement fédéral, un coût très bas si l’on prend en compte les 25 années durant lesquelles les habitants de notre région ont été privés d’une procédure d’appel juste et équitable.

2. Déduction fiscale pour les habitants du Nord

La déduction fiscale pour les habitants du Nord (DFHN) est un crédit d'impôt équitable destiné à aider les familles qui choisissent d'habiter et de travailler dans le Nord du Canada. Ce crédit a été créé en 1988, mais son montant n’a pratiquement pas changé depuis 19 ans.

Enfin, après avoir subi d'intenses pressions en faveur d’une hausse de 50 %, le gouvernement a accepté d'augmenter la DFHN de 10 % dans le budget de 2008-2009. Cette majoration est loin de permettre d'assumer les coûts élevés de l'énergie, de la nourriture, du logement et de la plupart des biens et services. Dans de nombreuses communautés nordiques, le coût de la vie est deux fois supérieur à celui des régions urbaines du Canada. Étant donné les coûts extrêmement élevés des biens et services dans le Nord, nous payons plus de TPS sur les biens de première nécessité. Cela signifie essentiellement que la TPS nous reprend en grande partie ce que nous donne la DFHN.

La montée incessante du coût de l'énergie frappe le Nord de plein fouet, car dans la plupart des communautés, le mazout constitue l'unique source de chauffage et d'électricité. Les habitants des T.N.-O. et du Nunavut éprouvent toujours de la difficulté à subvenir à leurs besoins en raison du coût de la vie extrêmement élevé.

Le budget de 2012 doit prévoir une augmentation de 50 % de la DFHN, et à cette fin des fonds de l'ordre de 50 millions de dollars. 

3. Sécurité du revenu de retraite

La mise en œuvre des régimes enregistrés d'épargne-retraite (REER) s'est révélée un échec lamentable pour les travailleurs canadiens. Plus de la moitié d’entre eux ne peuvent pas y investir quelque montant que ce soit, et ceux qui disposent d’un REER sont loin d'avoir un revenu de retraite suffisant.

Les Canadiens ne devraient pas craindre la retraite. Dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut, il devient nécessaire de s’installer ailleurs et de quitter la maison et la famille parce que le revenu de retraite ne suffit pas pour vivre.

Les prestations du Régime de pensions du Canada (RPC) sont insuffisantes, et même combinées au programme de la Sécurité de la vieillesse et au Supplément de revenu garanti (SRG), elles laissent toujours les bénéficiaires dans la pauvreté. Notre société ne devrait pas accepter que des gens qui ont travaillé toute leur vie d'arrache-pied soient condamnés à finir leurs jours dans la pauvreté. Dans le budget de 2012, le gouvernement a la possibilité d'apporter des améliorations au régime national de pensions.

La FTTN exhorte le gouvernement fédéral à doubler progressivement, au cours des sept à dix prochaines années, les prestations du RPC. Cela pourrait se faire en augmentant modestement les cotisations des employés et des employeurs.

Par ailleurs, la récente revue à la hausse du Supplément de revenu garanti par le gouvernement fédéral est loin de sortir les personnes âgées de la pauvreté. Nous recommandons d'augmenter les prestations maximales du SRG de 110 $ de plus par mois afin d'enrayer la pauvreté chez les aînés. On estime que cette mesure coûterait 1 milliard de dollars par an. Une réduction minime des plafonds élevés appliqués aux cotisations au REER pourrait contrebalancer ce surcoût.

Les Canadiens qui ont les moyens de cotiser à un régime de retraite devraient pouvoir bénéficier de prestations garanties. Le gouvernement devrait instaurer un système, financé au moyen de contributions versées par les promoteurs de régime de retraite, qui garantirait un revenu maximal de 2 500 $ par mois. Il pourrait commencer par couvrir les régimes de pension assujettis à la réglementation fédérale, puis créer un système national avec les provinces et les territoires.